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Reference:
À l’affiche de la NRF janvier 2020, le discours prononcé par Annie Ernaux à l’occasion du prestigieux prix Formentor qui lui a été décerné. Avec une rare justesse de ton, elle livre avec ce discours une ratification de son travail littéraire depuis plus de trente ans : contre l’humiliation sociale, la honte d’avoir honte, elle a gagné sa bataille d’écrivain.En littérature contemporaine, les auteurs de la rentrée de janvier se livrent à l’exercice de parler de leurs livres sans autopromo : Agnès Riva et le monde secret de l’enfance, Alain Blottière, rimbaldien de voyage et d’esprit, Alexandre Postel, guetteur de Flaubert à Concarneau, Côme Martin-Karl, analyste caustique des extrêmes dans toute leur trivialité et Elena Costa, observatrice modianesque des premiers temps d’un jeune provincial à Paris.
Le thème de l’impatience ne touche pas que les gilets jaunes en colère. De Sénèque à Tchouang tseu, du monde latin à l’antiquité chinoise, l’impatience est une école insatiable de contradictions. Romain Slocombe Chantal Thomas, dessinent d’autres perspectives inattendues.
Cinquante ans après mort de l’auteur de La peste, Albert Camus et Elsa Triolet sont les invités inattendus de ce numéro, sous la forme d’un échange de lettres inédites. A noter enfin l’arrivée de Maurice Genevoix au Panthéon dans la Chronique de l’amateur de Michel Crépu, et es notes de lecture, toujours attentives à la littérature qui vient.
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Date de disponibilité: 01/01/2020
Voyons, voyons, où donc pourrions-nous nous installer pour lire le texte de ce beau discours d’Annie Ernaux, en remerciement du prix Formentor qui lui a été accordé en octobre dernier, et qui nous met directement au fait de l’affaire qui a toujours été celle de l’auteur de La place : le sentiment d’être illégitime, de ne pas être à sa place devant le jury. Quel jury ?
Vouloir faire de Gustave Flaubert un personnage de roman, c’est se confronter à quelques périls. Celui du faux, du postiche, du carton-pâte. Celui de la redite, puisque Gustave F. est le protagoniste d’au moins deux romans majeurs : le brillant Perroquet de Flaubert, de Julian Barnes, et le colossal Idiot de la famille, certes répertorié comme un essai mais que Sartre définissait comme « un roman vrai ».
J’ai rencontré Évelyne au mois de novembre 1987, à l’âge de dix-huit ans. Je venais de quitter Antibes où je vivais alors avec mes parents pour m’installer à Paris et étudier le droit. Notre liaison n’a duré que quelques mois mais il me semble que nous nous sommes fréquentés beaucoup plus longtemps, Évelyne et moi. Elle est l’une de ces femmes qui continuent de façonner votre existence après vous avoir quitté.
Quand on me demandait, après la sortie de mon premier roman Géographie d’un adultère, d’où me venait mon intérêt pour les lieux, je ne savais jamais quoi répondre. Et puis, je repensais immanquablement à la façon ingénieuse dont ma maîtresse de maternelle avait aménagé sa classe.
R. travaillait dans un petit camion-crêperie itinérant qui s'appelait « la crêpe mobile », mais qui, pour autant, n’avait adopté aucun des codes graphiques issus de l’univers Batman. Il confectionnait des galettes circulaires, assez caoutchouteuses, sans vraiment de goût. Il avait appris sur le tas. Personne n’envoyait jamais de réclamations, on était loin de la Bretagne et d’éventuels puristes..
Nous avions cherché son ombre, son fantôme, dans les rues de Harar. Le père Émile Foucher, capucin sauveur de lépreux, nous avait hébergés dans sa mission. Le bon père avait repéré dans la ville les sept emplacements supposés des maisons où, près d’un siècle plus tôt, tanné par les climats perdus, il avait habité.
Par où commencer ? Peut-être par cette incrédulité que j’ai ressentie à l’annonce que le prix Formentor m’était décerné, comme il l’a été à des écrivains du monde entier considérés parmi les plus grands. En moi se disputaient la fierté et un sentiment d’illégitimité. Ou plutôt, la fierté – par laquelle je reconnaissais la valeur du jury et de son verdict – tâchait de faire taire le soupçon et la crainte de mon illégitimité. Que le prix, au cours du temps, ait récompensé peu d’écrivaines, me plaçait, par ailleurs, dans l’ambivalence : celle de regretter l’inégalité antérieure concernant les femmes tout en me sentant valorisée secrètement en tant qu’exception.
Deux ans, jour pour jour, avant la capitulation de l’Allemagne nazie, Elsa Triolet entame une correspondance avec Albert Camus, un jeune écrivain qu’elle connaît à peine, dont les ouvrages récents ont marqué son écriture des années de guerre. En ce printemps 1943, elle est déjà engagée dans la résistance communiste et vit dans la clandestinité, et en même temps, paradoxe des années noires, son roman Le cheval blanc rencontre le succès commercial.
Les Romains de bonne époque (fin de la République, débuts de l’empire) faisaient profession de détester l’impatience, au sens où nous entendons généralement le mot, c’est-à-dire le refus d’attendre l’heure propice…
C’était juste un banal accident de la circulation.
Ma mère était peintre, et une personne excessivement nerveuse.
Depuis son inscription à l’auto-école, nous nous demandions, au sein de la famille, comment un examinateur pourrait jamais lui accorder le permis de conduire.
Ne pas supporter une chose, c’est de l’intolérance, alors que ne pas supporter que dure un état de choses, qu’il se prolonge au-delà de ce que nous jugeons admissible, c’est de l’impatience. L’impatience se traduit de façon plus ou moins ouverte par une réaction d’irritabilité et d’agitation face à ce qui entrave le cours de notre action et contrarie notre sentiment d’efficacité.
Je me trouve dans un train en direction d’Arcachon. À un moment, encore loin de Bordeaux, il s’arrête, en plein milieu de Rien, c’est-à-dire dans un de ces espaces nuls, sans reliefs ni repères, qui semblent avoir surgi avec les parcours des Trains Grande Vitesse. Dans le sillage de leur trajet aveugle. Il nous est aussitôt précisé par haut-parleur que nous ne sommes pas dans une gare et qu’il ne faut pas s’aventurer sur les voies.
Je relisais À la recherche du temps perdu à Ostende en février 2016 quand, un soir, avant de me coucher, je repensais en me brossant les dents aux dernières pages que je venais de lire, intrigué par un passage qui m’avait frappé de façon subliminale mais qui demeurait à la surface de mon esprit, comme s’il ne parvenait pas à s’inscrire en profondeur dans ma conscience. Ce qui était troublant, c’est que la sensation d’incomplétude que je gardais de la lecture de ce passage n’était pas sans rappeler la façon dont le narrateur lui-même décrit l’impression que lui a laissée la vue des trois arbres d’Hudimesnil.
L’existence des chroniques de cinéma de Truffaut, recueillies par lui-même dans Les Films de ma vie (1975), et antérieures pour la plupart à ses films, est bien connue. Elles nous baladent à l’intérieur de son système de cinéaste et l’éclairent par anticipation car son activité de critique avait fondé en partie sa pratique du cinéma.
Il y a bien des manières dont un passionné de littérature, et qui pourtant n’est pas un écrivain, peut faire de cette passion l’axe de sa vie, au-delà de la simple lecture. On peut être enseignant, chercheur, éditeur, théoricien de la littérature, critique au sens d’appréciateur dans la presse des nouveautés littéraires, ou critique encore, mais dans un sens moins éphémère et plus ambitieux. Je me suis essayé dans plusieurs de ces voies avant de m’arrêter à la dernière et de m’y exercer assez longtemps pour éprouver aujourd’hui le besoin d’y réfléchir.
Il est, en Italie, deux tombeaux dressés au bord de la mer et qui, d’une rive de la péninsule à l’autre, marquent les bornes de la civilisation : celui de Virgile à Naples ; à Ravenne celui de Dante. Virgile revint de Grèce mourir en Italie : Hermann Broch a raconté comment. Son mausolée, bien sûr, est vide.
La fracture, c’est d’abord celle qui a brisé la vie de Selena en un avant et un après, l’événement tragique advenu dans son adolescence et qui depuis la hante : la disparition mystérieuse, jamais résolue, de sa sœur Julie, un peu plus âgée qu’elle. C’est ensuite l’improbable passage par lequel Julie, soudain réapparue vingt ans après – mais est-ce bien elle ? – prétend avoir glissé vers un autre monde, la planète Tristane, dont Julie nous apprend en partie l’histoire, la géographie, les mœurs et les institutions. Nina Allan ne substitue en rien la deuxième fracture à la première..
Quelle heureuse surprise, cette publication inédite à ce jour en français ! Pas du tout un fond de tiroir mais un objet littéraire merveilleux : Londres visité, portraituré par Virginia Woolf elle-même ! La dernière fois que nous avions bénéficié de la conduite d’un connaisseur,c’était avec Paul Morand, la plus british des éminences du quai d’Orsay. Mais quelle fête avec Virginia !
On connaît les spectacles de Bartabas, conjuguant art équestre, danse, musique, comédie. Inventeur de cette forme poétique, vivante, inédite avant lui, il s’essaie avec ce livre à un autre exercice, moins spectaculaire, plus solitaire, mais tout aussi riche d’émotions esthétiques. L’idée, excellente, est de se raconter, un peu, par le biais des chevaux qui ont jalonné l’existence de « Bartabas le furieux » et d’évoquer la rencontre de ceux avec lesquels le compagnonnage fut particulièrement intense.
Labyrinthique : c’est ainsi que les traducteurs de Francis Yates qualifient son écriture – Daniel Arasse pour L’art de la mémoire (Gallimard, 1975, original paru en 1966) et Boris Donné pour Le théâtre du monde (Allia, 2019, original paru en 1969).
Dans Le théâtre du monde, Frances Yates s’intéresse aux théâtres anglais de l’époque classique, dont le plus emblématique est le Globe où Shakespeare créa ses pièces. Elle démontre que le plan, dessin et dessein, transcrit dans la construction l’idée de la dimension spirituelle de « théâtre du monde ».
Maurice Genevoix (1890-1980) va entrer au Panthéon. Si les morts ont une vie, il doit être furieux. Lui l’amoureux des sentiers d’aubes bourguignonnes ! Le familier du Loiret, sa manière de cousiner avec le territoire proustien… Se retrouver sous l’énorme coupole sans une petite rivière pour miroiter, il y a de quoi faire sentir son mécontentement. Mais comme Genevoix a toujours été courtois y compris avec la mort, il y a peu de chances que nous allions au clash.
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