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Reference:
De la fin du monde, thème infiniment décliné dans la littérature, aux versants les plus contemporains de celle-ci, le territoire est vaste : Tristan Garcia, Yannick Haenel, historiens et philosophes se penchent sur notre fin toute proche tandis que Célia Houdart, par le biais de "La vie des formes" rend hommage à Agnès Varda, que Samuel Poisson Quinton raconte comment une bière avec Jaccottet l'a emmené jusqu'aux rivages grecs, et bien d'autres choses aussi inattendues que, mettons, une traduction d'une nouvelle inédite en français d'Edgar Allan Poe, Saute-Grenouille .
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Date de disponibilité: 04/07/2019
Le regretté Dominique Noguez aurait aimé cette visite pique-nique de Samuel Poisson-Quinton au maître Jaccottet, une variable champêtre de la visite au « grantécrivain », comme l’appelait Noguez, qui n’aimait rien tant que de telles fantaisies où l’amour de la littérature fait passer ses messages.
Combien de fois le monde n’a-t-il pas fini ?
Quelque chose avait commencé.
Avant même que la conscience n’en émerge, il y a environ 250 millions d’années, la vie est presque morte toute entière ; au cours de la plus grande extinction de masse, l’extinction permienne, plus des neuf dixièmes des espèces qui vivaient dans l’eau et plus de deux tiers des espèces terrestres ont disparu.
Lors d’un séjour à Béthune, il y a quelques années, j’ai visité l’ancienne Banque de France. Elle était en chantier car on la transformait en centre d’art. Je pris plaisir, ce jour-là, à déambuler sous la conduite de son futur directeur à travers la grande salle des Guichets, celle des Coffres, celle aussi des Archives aux immenses classeurs muraux ; nous traversâmes la serre des monnaies, avec sa coursive, ses pupitres à roulettes et son monte-charge ; et je fus convié à admirer cette chambre froide où l’on stockait naguère les billets usagés.
Les remarques qui suivent sont le résultat d’un échange épistolaire auquel on a choisi de donner la forme finale d’un carnet d’observations.
1. L’ambition picturale de Bruegel est démesurée, et peut être même inatteignable : « montrer le monde en train d’être le monde ». C’est une ambition à la fois très prosaïque et en même temps métaphysique, voire même théologique. Car montrer le monde en train d’être le monde, c’est, d’un même mouvement, montrer sa fin.
En pareil cas, la majuscule compte double, voire triple : « monde » ou « Monde », « Fin d’un monde » ou « Fin du Monde », Déluge ou Apocalypse ? Rarement cette distinction, qui marque l’écart entre l’abolition cataclysmique (et régénératrice) ou la lente décomposition d’une entité historique et le Jour de Sa Colère, celui du Grand Jugement évangélique, n’aura été aussi opérante qu’avec Georges Bernanos.
On parle beaucoup, ces derniers temps, de fin du monde. Mais il faut ici un peu de clarté, et rappeler l’évidence : parler de fin du monde, c’est devoir admettre qu’on ne sait pas de quoi on parle ; on ne le saurait, du reste, qu’après coup, si la chose était pensable. Et précisément elle ne l’est pas (« Alors, tout s’est bien passé ? »).
Au Carbonifère, il y avait des forêts luxuriantes. Plusieurs Amazonies. Des prêles, des fougères géantes poussaient sur les rives.
Ces forêts n’ont pas brûlé. Elles ont sombré. Elles ont été trempées puis submergées par des eaux de pluies diluviennes.
Des forêts noyées noires, que survolaient des libellules.
L’un de mes professeurs, Michel Sandras, répétait à l’envi : « Apprenez des poèmes – personne n’est à l’abri de la prison. » En attendant ce jour, j’en apprends. Ces dernières années, plus beaucoup, mais je ressasse (fredonne ?) ceux que je connais déjà par cœur : en marchant, en pédalant. Quelquefois j’ai un trou ; mais les trous c’est intéressant – ça occupe, ça remplit, c’est une aventure ; on part alors en quête de la parole absente, de l’alexandrin échappé, du mot qui a foutu le camp : ça rythme : ça creuse.
Rater le mariage de son meilleur ami, je ne le souhaite pas même à mon pire ennemi. C’est l’affront par excellence. Le soufflet, la torgnole. Encore aggravée quand l’ami en question vous fait l’honneur de vous élever au rang de témoin. Le meilleur homme. Le fidèle parmi les fidèles. Alcibiade. Sancho Pança. Celui à qui il incombe de recoudre un bouton en cas de catastrophe, raffermir une conviction qui pâlirait avant le moment suprême, puiser opportunément dans un stock de chansons paillardes, et tenir enfin les affaires du marié pendant qu’il vomit ses tripes après les agapes.
Ce 21 mars, les talus hésitaient encore à verdir, et ce manque de conviction aura été partagé par l’éclairage mouvant qui jouait à cache-cache avec les tunnels et l’orientation de la rame, sans jamais s’attarder très longtemps sur la tablette amovible du tégévé vers Rennes. Idem pour les bosquets encore majoritairement grisâtres, malgré quelques irisations vert mousse ici et là.
Laurence, qui a pourtant toujours la sienne, s’intéresse vivement aux textes de deuils centrés sur la figure de la Mère. Après avoir lu la première version de mon recueil de poèmes Même mort, consacré au décès de mes parents, elle me fait part de son sincère étonnement : je n’aborde pas le thème des photographies de la mère enfant, alors qu’il s’agit d’un passage obligé du genre. « Barthes, bien sûr, précise-t-elle, La chambre claire, mais il en va de même dans presque tous les écrits sur le sujet. »
Par discrétion, je donnerai à chacun son nom de poney. Comprenons-nous : rien n’est trop noble pour le cheval. Donnez à un cheval le nom d’un empereur, l’empereur en sortira grandi. Mais le poney, lui, ne souffre que des noms dérisoires. C’est sa mélancolie : petit il est, petit il vieillira. Son nom ne sert qu’à rassurer, à attendrir, ou encore à promettre de timides aventures. De la même façon que les chiens ressemblent à leurs maîtres, nous sommes ce que nous montons. Ainsi possédons-nous tous un nom de poney. Si vous ne me croyez pas, regardez un peu autour de vous. Observez vos familles, vos amis, vos collègues : vous identifierez à coup sûr un Cachou ou un Caramel, un Orage, un Pépito, une Rumba…
Si la littérature est au cœur des travaux de Laurent Dubreuil, auteur de nombreux essais, professeur à l’Université de Cornell, il s’y intéresse toujours dans ses rapports avec d’autres formes de pensée, comme la philosophie, les savoirs (L’état critique de la littérature, Hermann, 2009), les sciences ( The Intellective Space, Minnesota University Press, 2015), mais aussi la politique, comme dans L’empire du langage – colonies et francophonies (Hermann, 2008), où il analyse la domination coloniale à travers les langues, et surtout les voix qui mettent en échec ce discours oppressif. Son dernier ouvrage, déjà très remarqué, La dictature des identités, paraît cependant atypique, puisqu’il se présente comme un témoignage critique sur le débat public aux États-Unis, et sur la place qu’y prend la notion d’« identité », d’abord dans les universités, puis bien au-delà.
Je n’ai jamais connu quelqu’un d’aussi porté sur la plaisanterie que l’était le roi. Il semblait ne vivre que pour plaisanter. Lui raconter une bonne vieille histoire sous forme de blague, et bien la lui raconter, était le plus sûr moyen de s’attirer ses bonnes grâces. Ainsi, il se trouvait que ses sept ministres étaient tous réputés pour leurs talents de farceurs. Ils ressemblaient d’ailleurs au roi : tous étaient gros, corpulents, adipeux, et doués d’un goût inimitable pour la bouffonnerie.
Avant la parution en 2018 de l’anthologie Des choses m’ont échappé, qui fait enfin entrer la poésie de l’Égyptienne Iman Mersal dans nos librairies, un seul de ses textes avait traversé les frontières : un poème-récit génial, déjanté et poignant, publié à deux reprises en traduction française, intitulé « Le seuil ». Sa première apparition eut lieu dans un numéro de La pensée de midi consacré à la littérature égyptienne,sa deuxième dans un livre remarquable intitulé Les poètes de la Méditerranée, anthologie multilingue (hélas épuisée), parue en 2010 à la faveur d’une collaboration entre Gallimard et L’Institut français. Iman Mersal, née en 1966 dans un village du delta du Nil, y côtoie de grandes figures de la poésie arabe comme Mahmoud Darwich, Adonis ou Abdellatif Laâbi.
À la fin de sa vie, dans Le clair et l’obscur, ouvrage laconique et testamentaire, dernière tentative d’approche, toujours de biais, du sacré et de la métaphysique, Jean Paulhan dessina, dans le plus épais brouillard, une sorte de voie vers la sagesse, tout en jugeant la première impraticable et la seconde tel un miroir aux alouettes.
C’est un énorme buisson étincelant de pensées exprimées en une langue caressante. Langue toujours nette, sans afféteries ni emphase, d’une élégance naturelle, vertu éminemment classique. Et pensées limpides par constant respect des lecteurs, ces compagnons de lecture, comme un cercle d’amis. Ainsi se révèle Partis pris, sous-titré Littérature, esthétique, politique, ouvrage que Marc Fumaroli publie aujourd’hui chez Robert Laffont dans la collection « Bouquins ».
Les géants de la littérature s’éloignent-ils ? Eux non, mais nous nous en allons, plus ou moins inconscients. L’hermétisme dont on a affublé Mallarmé, l’arrogance du poème muet dans la pâleur de la page, sont probablement entrés en contradiction avec la croisade pour l’oralité qui caractérise notre époque. De sorte que l’énorme rupture opérée par Mallarmé, dont presque tout le xxe siècle poétique a procédé, est devenue orpheline au siècle suivant. Il aura donc suffi de très peu de temps pour sa radicalité ne lui soit plus un avantage. Au moment où Bertrand Marchal proposait une nouvelle édition de ses œuvres complètes dans la Pléiade (deux tomes parus 1998 et 2003) Mallarmé, cardinal et objet de fantasmes, étincelait encore des « sollicitations des modernités successives ».
Dans une rue cossue du VIIe arrondissement, une jeune femme passe ses journées allongée, avec pour seule compagnie les livres, nombreux, dans lesquels elle se perd, et des poissons d’argent, ces petits insectes bibliophages dont elle entretient la prolifération. C’est que, selon l’auteur russe mythique Nikolaï N. Orlov dont elle est une fervente lectrice, ces petits insectes,en grignotant le papier mais pas l’encre sur la page, réalisentl’acte même de lire, qui est de créer son propre livre en entrantdans les mots (les trous) de celui qu’on a sous les yeux.
Hilton Als, journaliste au New Yorker notamment, a reçu en 2017 le prix Pulitzer de la Critique, grâce à quoi nous pouvons lire aujourd’hui la traduction de son premier essai, paru en 1996 chez FSG. Quand il écrit ce premier ouvrage, Als a 36 ans. Sa mère est morte depuis peu.
Au temps lointain des années 80, le nom de Giani Stuparich était familier auprès de ceux, nombreux alors, qui se passionnaient pour la littérature européenne, celle-là même dont Milan Kundera avait chanté les louanges et Claudio Magris détaillé la géographie dans son Danube avec un merveilleux talent d’archiviste du « mittel europa ». C’est à ce moment qu’un nuage de faveur glissa sur l’œuvre de Giani Stuparich avant de s’effacer à l’horizon.
Les « chemins de désir » désignent, pour les architectes et les urbanistes, les sentiers spontanés créés par les usagers à côté des voies prévues pour eux, par xemple, une trajectoire d’herbe foulée et jaunie parce qu’il est plus pratique de traverser là que plus loin. Anonymes, « ils font leur lit où la vie passe, invisible et déterminée ». Claire Richard en apprend l’existence au détour d’une conversation avec une amie revenue d’une consultation avec une sexologue, qui envisage son métier davantage comme une archéologie du désir, une exploration des tunnels que constituent en nous nos fantasmes, goûts, excitations intenses et aversions.
David a peint Napoléon en pied dans son cabinet des Tuileries. Un gros garçon de quarante-trois ans, la main glissée à l’horizontale contre l’estomac, as usual. On est en 1812, il va déclarer la guerre à la Russie. C’est donc Napoléon ce Corse rondouillard qui fait peur à toutes les cours d’Europe ? L’empereur d’Autriche lui a donné sa fille, Marie-Louise, dont il a eu un fils, le « roi de Rome ». Nous sommes au point culminant de l’aventure. Envahir et conquérir la Russie reste le dernier objectif. Ensuite, on s’occupera de l’Angleterre et alors la paix régnera sur le monde. Mais d’abord la Russie.
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