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L’adjudant Castex fait sa ronde dans Paris désert. Il possède un gros sifflet en bois. Il chausse d’énormes souliers noirs, aux lacets de cuir. L’Etat commence là. Après, peut-être, un képi chamarré. Les retardataires du couvre-feu n’ont qu’à bien se tenir, le sifflet de l’adjudant sait où se cachent ces petits misérables qui croient pouvoir ruser avec l’Etat. Quand il embouche son gros sifflet, on l’entend jusqu’au zoo de Vincennes, au pavillon des singes et des lions. Ce qui est émouvant avec l’adjudant, c’est sa loyauté, son absence de calcul, de recherche d’effets.
C’est un entretien de Giscard avec Frédéric Mitterrand. On a vu cela à la télévision, sur la chaîne parlementaire. L’ancien président parle de littérature et de poésie, il récite le poème de Baudelaire, le fameux « vert paradis des amours enfantines ». Le ton est posé, calme, sans la moindre affectation rhétorique. On écoute les vers arriver les uns derrière les autres, comme on déroule un papier chinois. La voix de Giscard ne résonne pas, elle dépose. Le poème de Baudelaire est un des plus beaux.
Ce n’est pas un chêne qu’on abat, plutôt le tilleul qui s’affaisse sans un bruit. Giscard s’en va dans un grand moment français d’incertitude, un tumulte d’époque qui ne sait plus à qui s’adresser pour la conduite à suivre. Du temps de ses jeunes années, jeune ministre à l’aise avec tout, ce n’était pas difficile de voir en lui, non une figure d’héritier comme si nous étions en monarchie, mais de successeur. Pompidou avait occupé le fauteuil comme un banquier fumeur de blondes, amateur de modernité chassé par la maladie au terme de longs mois de souffrance stoïque.