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Ce qu’il y avait, d’abord, chez Pierre Hassner qui vient de mourir, c’était son cartable. Une sorte d’invraisemblable sacoche d’où débordait un chaos de papier, de pages de livres à bout de souffle, à force d’avoir été lus et relus et plus encore. Il avançait dans la rue, avec son allure de petit juif roumain traînant avec lui le cartable extraordinaire, tenant de la carriole de saisonnier et du secrétaire des archives du musée Guimet. Le chaos de papier, c’était l’histoire de l’Europe au XXe siècle, un vivier de drames et d’intelligence, d’horreur et de sublimité.
Qu’est-ce que cela peut bien faire à Philip Roth d’être mort à 85 ans, lui qui a été un si grand vivant de la littérature ? Quelle question. Et cela est d’autant plus fascinant que Roth ne s’intéressait à rien d’autre : comment la mort et la vie ne forment qu’une seule et même réalité sexuelle, éventuellement montrable, racontable, risible, émouvante, en tous les cas la grande matrice. Il n’y a rien d’autre à raconter que la façon dont les êtres vivants habitent leur existence sans qu’il soit possible, à aucun moment, d’avoir un peu de recul sur ce spectacle.
On aurait presque envie d’écrire : « la Wolfe Tower », comme il y a une Trump Tower. Tom Wolfe, qui vient de mourir à 88 ans, aura figuré à lui tout seul une espèce d’œil du cyclone américain qui ne demandait la permission à personne avant de présenter ses grandes scènes à la manière d’un Zola, d’un Balzac.
Écoutons, c’est Ovide qui parle : « Tu iras seul, mon petit livre, à Rome, et je ne t’en veux pas : ton maître, hélas, est privé de ce droit. » Ainsi commence Tristesses, monument de littérature qui vient de recevoir une nouvelle traduction aux Éditions Sables , grâce aux bons soins de Jean-Luc Lévrier.