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Il y a presque quelque chose d’italien dans l’apparente lenteur germanique de l’après Merkel. Ne dit-on pas qu’il va falloir des semaines, des mois, pour mettre sur pied une coalition gouvernementale digne du nom ? On se croirait à Milan, mais non, nous sommes bel et bien à Berlin, où les tractations vont leur train. Tout le mois de septembre a été un mois d’adieu à Angela, sorte de reine Victoria à sa façon, assumant une simplicité de mise qui tranchait avec d’autres grandes figures féminines de la scène politique internationale. Ces adieux ont passé le Rhin. Nous avons tous ressenti obscurément que nous devions quelque chose à cette petite dame venue de la lointaine RDA, déjà assez mûre pour remplir son rôle de dirigeante, comme une déjà vieille habitude. C’est bien la première fois qu’un tel phénomène politique se produit de part et d’autre du grand fleuve. Et puis c’est que la longue durée du règne merkelien a favorisé un partage des événements, une sorte de synthèse de fin du XXe siècle – chute du Mur – avec le début du XXIe – attentats du 11 septembre. On ne pouvait pas aller plus loin dans l’apparition d’une nouvelle ère pour l’Europe. Sans doute fallait-il la bonhomie merkelienne pour que les grandes tragédies du XXIe siècle débutant soient affrontées sans perdre la tête. Le grand talent de Mme Merkel aura été de garder ce calme dont nous avons tous bénéficié à des degrés divers. Il y avait quelque chose de tout bonnement réconfortant à savoir Angela dans son bureau de Berlin.
M. Olaf Scholz, chef de file de la gauche allemande (pour user d’un vocabulaire politique à la française) a « remporté » l’élection d’une demi-tête, mais suffisamment pour qu’Angela Merkel le félicite sans ambiguïté. Scholz a eu ce bon mot pendant la campagne électorale, l’un des plus drôles de l’année selon nous, quand il a dit au micro d’un quelconque meeting « qu’il pourrait très bien faire chancelière ». C’était une façon amusante de reconnaître à Mme Merkel une forme de souveraineté « trans » bien dans l’atmosphère de notre époque. M. Scholz, on le voit bien, ne paraît pas un foudre de radicalité à la mode du jour. Un imperceptible voile de fatigue nous sépare de sa gentillesse évidente. C’est une fatigue vertueuse, nullement dépressive. Aucune surchauffe hystérique là derrière. Et puis l’extrême droite allemande est dans les choux, on a déjà donné, cela ne prend plus. Quelle différence avec l’agitation zemmourienne qui fait déjà le spectacle, dans son entreprise de désintégration de la droite française. C’est ce que nous allons voir.
Quant à la victoire de M. Jadot, chef de file des écolos, elle frise le miracle. Les écolos n’ont pas l’habitude de prendre de sages décisions. Il fallait voir la tête de M. Jadot déclarant que la grande cause écologique était de gagner l’élection présidentielle. Il paraissait douter lui-même du bien-fondé philosophique d’une telle aspiration qui pouvait le pousser jusque sur les marches de l’Élysée. Et puis finalement non, quelque chose d’adulte a soufflé dans les esprits. Pour un peu, on se prendrait à parler d’une « olaf-scholzienne » attitude des écolos français. N’hésitons pas. Restons cool.
Michel Crépu